Mireille aimait la musique, qui ne prenait pas une place si importante que ça dans sa vie quotidienne. Elle avait deux chefs adulés : Karajan et Giulini. Ses goûts étaient assez restreints et tournaient autour de Mozart, Beethoven, Tchaïkovski et Mahler. Négligemment, au moment de vider la maison familiale, je n’ai récupéré que quelques CD, aucun vinyle ; j’en suis assez triste aujourd’hui, ça aurait fait un beau souvenir.
Les deux filles de Mireille et Guy, ma mère et ma tante, ont chacune fait un peu de musique dans leur jeunesse. Ma mère, du piano. Elle m’a beaucoup joué petit, à ma demande répétée, un rondo inconnu de Hummel que j’aimais bien, autrement elle n’était pas très bonne pianiste. Ma tante a appris le violon. Je ne l’ai entendue qu’une seule fois, elle n’a jamais voulu jouer une fois de plus en ma présence, à mon grand déplaisir d’enfant, arguant de son faible niveau. « Le violon, de deux choses l’une : ou tu joues juste, ou tu joues tzigane. Moi, je joue tzigane ! » (Boby Lapointe) Je ne leur jette pas la pierre, quand je vois mon très mauvais niveau de piano… Ni Guy ni Mireille ne jouait d’un instrument à ma connaissance. Le piano droit familial, sur lequel ma mère a appris à jouer, je l’ai toujours connu transformé en bar, beau meuble étripé de sa table d’harmonie, dans lequel mes grands-parents rangeaient les alcools et leurs beaux verres.
Mireille aimait d’amour les chansons de Jean Ferrat ; elle détestait celles de Brassens, que j’adore. Si vous n’avez pas tout suivi, je glisse simplement pour vous aiguiller qu’il y avait l’intégrale des discours de Jacques Duclos dans la bibliothèque grand-parentale, trois gros volumes verts intimidants (drôlissime lecture, au demeurant, à petite dose ou au troisième degré).
Oh ! grand-mère, nous aurions sûrement eu bien des désaccords musicaux mais j’aurais aimé en causer, au-delà de mes seize ans un peu bêtes.