Eloge de la lourdeur
Par FabriceD le mercredi 11 octobre 2006, 22:31 - Accords et désaccords - Lien permanent
Rien à voir avec mon humour, merci.
La popularité constante de la musique légère m'inquiète de plus en plus. Ces viennoiseries straussiennes et annuelles, ces marches de Souza que les américains persistent à écouter, le Chanteur de Mexico de nouveau à l'affiche : toujours, partout, de la musique légère. De grands artistes la défendent avec conviction (Arthur Fiedler) ; des hommes d'affaires avisés en font leur fond de commerce (André Rieu). Dans tous les cas, on la joue.
Ce qui, notez bien, ne m'inquiète pas en soi : qu'on joue de la musique légère, très bien. Mais quid de la musique lourde ? qui pour la défendre ? qui, même, pour l'écouter ?
Attention, ne mélangeons pas tout. Je vois d'ici les quelques mélomanes délicats qui me lisent faire la moue. Il exagère, se disent-ils, la musique lourde fait florès : Marche des trompettes d'Aïda, Chevauchée des Walkyries, Ouverture 1812, on n'entend que ça. Certes, mais il y a lourd et lourd : Wagner, par exemple, n'est pas lourd mais germanique, cela ne compte pas. Je parle, moi, de la musique lourdement lourde, celle dont les titres seuls font déjà peur. La victoire de Wellington, de Beethoven, avec ses trois orchestres, ses canons et ses mousquets ; Les Fonderies d'acier, de Mossolov, marteau-pilon et bruits de casserolles ; Fatum, de Tchaïkovsky. Qui joue encore ça ? Svetlanov et Dorati morts, qui pour prendre la relève ?
Peut-être est-ce le fruit d'un gigantesque complot, que cette silencieuse disparition... Un coup des spécialistes de l'audition ! Je les imagine, avec leurs blouses blanches, leurs petites lunettes rondes et leur stylo bille dans la poche pectorale : je les imagine dérobant des partitions pompières, arrachant les affiches de concerts cacophoniques et improbables, planifiant tranquillement dans le calme de leurs arrières-boutiques la disparition de la musique qui fait Pouet !
Si l'on n'y prend pas garde, ils mèneront leur projet à bien - au nom de quoi ? d'un énième principe de précaution ? du bon goût ? je ne sais. Mais tout cela m'inquiète.
Commentaires
Quand je lis ce genre de billet, je me sens terriblement ignorant. Quoi que, quoi que... J'ai quand même assisté à la Ravelisation de "Les tableaux d'une exposition", avec son lot de grosses cloches et gong pour le finale. Et il faut l'avouer, la musique qui fait "Gong !", secoue tout autant les tripes que les tympans.