Parce que c'était lui, parce que c'était moi
Par RomainT le mardi 4 juin 2013, 19:48 - Omphaloscopie - Lien permanent
Voir épisodiquement voire très épisodiquement certains amis me rappelle combien je ne suis pas doué pour l’amitié, au sens où l’on serait doué d’une habileté physique
comme dessiner, tenir sur des skis ou réussir de bonnes quiches lorraines. On trouve quelques pistes en creusant un peu la question, mais j’aurais bien du mal à expliquer cela en détails (à moins peut-être d’une psychanalyse de plusieurs années ?). En tout cas c’est un fait, qui s’ajoute à la longue liste de ceux qui nous caractérisent. J’ai été étonné, à l’occasion d’une discussion de trois heures dans les transports lyonno-parisiens, de voir qu’un collègue vivait l’amitié d’une manière très proche de la mienne. Comme quoi, des évidences supposées sont loin de toujours se voir comme le nez au milieu de la figure.
N’empêche, pour certains, l’amitié est en quelque sorte innée ; du moins elle le parait. Ces personnes-là respirent l’amitié, elles la vivent par tous les pores de la peau, rien ne semble s’opposer à l’infini des contacts et des relations, et ce à la fois avec une grande simplicité et beaucoup de naturel ; bref, elles sont l’amitié. J’idéalise peut-être. Je ne mets pas pour autant la relation amicale sur un piédestal. Je n’éprouve pas de jalousie ou d’envie, je constate. Alors que paradoxalement c’est l’un des plus beaux sentiments qui puisse exister, j’ai l’impression de mal le cultiver, que je ne fais pas forcément la somme de petits efforts nécessaires et qu’on ne peut pas faire à ma place, dans une relation par définition fondée sur la réciprocité.
Etre fils unique avec des parents divorcés tôt est un point de départ, auquel se sont ajoutées quelques activités qui n’aident pas : lecture, jeux de solitaire, astronomie. Un caractère réservé, plutôt intériorisé même si quelques poussées extérieures se font jour de temps à autres, une nette préférence pour l’écrit plutôt que l’oral ont conduit mécaniquement à la perte de toute relation avec des gens d’avant mes vingt ans — à l’exception d’une personne — et le maintien de bien peu après cet âge. Cela ne pèse pas mais c’est un sujet d’interrogation fréquente.
J’observe les relations que je peux ou non entretenir, celles que pour de mauvaises raisons je laisse filer, et comment les autres se débrouillent avec leur sociabilité. À trente ans, de même que pour d’autres on ne change pas l’impolitesse, la mauvaise éducation ou la bêtise, je sais qu’il est tard. Ah, les autres.